En avril 2002, j'avais pris quelques photos (ci-dessus) des sculptures de feuilles et glands de chêne vert, serties dans le portail de marbre de la chapelle de l'Aldeia da Luz, oeuvre du 15ème siècle d'un certain Mestre Joao. Ces sculptures existent toujours (ci-dessous, lors d'une lumineuse après-midi de décembre 2013). Elles ont été transportées et intégrées à la chapelle reconstruite à proximité du nouveau village après la mise en eau du barrage. L'autre plante représentée serait-elle une vigne?
Dans le montado, au coeur de l'Alentejo - Gente e natureza no Alentejo - Stories from Alentejo (Portugal)
samedi 30 novembre 2013
Une Almunia gorgée de fruits à Cercal do Alentejo
Jean-Paul Brigand et Ann Kenny sont deux passionnés qui ont constitué en quelques années un jardin incroyable sur le littoral de l'Alentejo, O Lugar do Olhar Feliz. Il contient notamment une collection richissime d’agrumes dont ils connaissent de nombreux secrets qu’ils partagent volontiers sur leur blog. (Photographies: Jean-Paul B. et Ann K.)
AG: Jean-Paul et Ann, vous avez en planté en quelques années un verger de plus de 2000 fruitiers. D'où vous est venu ce projet et pourquoi avoir choisi l'Alentejo?
JP & A: L'idée était de produire des
fruits de rêve, des fruits parfaits. Je ne sais pas combien de fruitiers il y
a. L'idée n'est pas d'accumuler, mais d'acclimater, de faire renaitre une
Almunia.
Quand
on regarde une carte climatique de l'Europe, l'Alentejo littoral est le meilleur
endroit pour établir un verger diversifié. Il y a de l'eau, les températures
sont limite pour les tropicales, mais possibles, limite pour les plantes du
nord, mais possibles. Cette côte ne soufre pas des mauvais vents méditerranéens. Et nous sommes en sol acide, ce qui nous donne accès à une vaste
sélection de plantes fruitières
AG : Dans ce verger, vous avez misé
particulièrement sur les Citrus. Vous avez plus de 250 cultivars de
citronniers, orangers, mandariniers, cédrats,… Quels sont vos trois ou quatre Citrus de prédilection?
JP&A : Les collections dominantes
sont les méditerranéennes à grande biodiversité ( grenades, figues, vignes, mûriers,…
) et les citrus qui sont des méditerranéens récents. Pour ce qui concerne les
acclimatations de Citrus, deux pays de domestication me fascinent : le Japon et
l'Italie. Ce sont deux gastronomies puissantes, originales qui fabriquent des
variétés de fruits passionnantes. Notre grande découverte est la possibilité de
faire ici des pamplemoussiers vrais (C. maxima et hybrides de C.
maxima) qui sont des fruits très intéressants - pour le coup inconnus des
Européens. Les buntans Hirado et Cristal donnent d’excellents résultats aussi.
Voici un pamplemousse Oroblanco, un dragon volant et un rangpur de Tahiti (et tout en bas, un Kabos):
AG : Qu'est-ce qui vous fascine dans l'histoire des fruitiers?
AG : Qu'est-ce qui vous fascine dans l'histoire des fruitiers?
JP & A : L'histoire des fruitiers
est l'histoire des hommes. Beaucoup de gens croient que la nature fait des
fruits. Mais non, ce sont les gens qui font des fruits! Les fruits sont notre
savoir et aussi notre gourmandise. Et cela commence dès avant la sédentarisation, puis explose dans des milliers de cultivars adaptés à des climats, des sols,
des lumières, des modes de vie et des traditions culinaires locales, des
besoins - comme les fruits secs indispensables depuis toujours. Une sorte de
foisonnement sur un grand fond de constantes, comme le paganisme. Les fruits
sont une technique, une esthétique et une poétique.
C'est dans ce qui reste
encore de ces joyaux que nous puisons, même si pour certains cela devient très
difficile. De nos jours on voit poindre un autre temps, celui de la grande culture,
celui de la mort de milliers de variétés, celui de nouveaux critères de
sélection des fruits. Ce temps a déjà commencé pour de nombreuses espèces.
AG: Existe-t-il des cultivars spécifiquement
alentejanos qui mériteraient d'après vous d'être réhabilités?
JP & A :
L'Alentejo est depuis toujours hors des voies de communication y compris maritimes - le seul
grand port est contemporain - , très peu peuplé, traditionnellement exportateur
de produits agricoles bruts. Franchement, il ne sert à rien de
chercher ici des cultivars traditionnels réhabilitables alors qu'il y en a tant
ailleurs. La Direction Régionale de l'Agriculture de l'Algarve est en train de
le faire avec méthode et avec des ingénieurs de qualité pour pas mal de fruits. Ils ont notamment trouvé un caroubier à fruit bien sucré et riche en pulpe. Mais pour le
reste, il semble bien qu'il ne reste rien de l'apogée médiévale arabe.
AG : Quels sont vos plus grands plaisirs
lorsque vous parcourez ces arbres en fleurs et en fruits?
JP & A : Notre jardin nous réserve
chaque jour une surprise nouvelle, c'est un bonheur sans fin. Ce climat donne
de la végétation toute l’année; aussi il y a des centaines de bonheurs. Il y a quelques jours encore, les feuilles des grenadiers et des kakis qui changent de couleur:
magnifiques! Manger une mandarine parfaitement à point, s’assoir au soleil,...
AG : Trois conseils à des débutants?
1 - Ne jamais croire à "la
nature", la nature ne fait rien de bon, c'est le jardinier qui fait et qui
sait. Apprenez, travaillez, ne faites rien au hasard.
2 - Planter c'est comme
construire une maison; il faut beaucoup travailler avant, sinon on a des
mauvais résultats très longtemps. Il faut donc bien choisir ses cultivars, ses
porte-greffe, ses emplacements
.
3 - Surtout sous nos latitudes : ne
tombez pas dans l'intoxication médiatique (le bio, le durable, etc.)
. On
jardine, on ne fait pas de la religion. Le bio est un corpus de préconisations
souvent dogmatiques qui visent un label dont vous vous moquez. Visez la
perfection. Faites un jardin avec des plantes les plus adaptées possible à
votre écosystème - par exemple faites des vignes sans traitement elles sont
excellentes -. Travaillez votre sélection de plantes; c'est le plus important.
Ici
un jardin est toujours totalement artificiel avec 5 mois d'irrigation. C'est
ainsi! Ne gâchez pas l'eau avec des pelouses ou des décoratives industrielles, mais ne soyez pas regardant sur l'arrosage des plantes domestiquées. Un jardin
sec c'est un désert.
Travaillez avec un calendrier lunaire - aidez vos plantes. Donnez une priorité absolue aux moyens mécaniques de défense contre les
insectes: piégez, utilisez des filets,...
Donnez aussi une priorité au préventif (les jus
d'algues comme fongicide préventifs), travaillez vos stratégies de
fertilisation (utilisez des fertilisants minéraux foliaires en cas de besoin,
c'est pas bio mais ça aide immédiatement les plantes) et enfin sous ce climat
ne pas hésiter à tailler en vert (sauf les palmiers qui ne se taillent qu'en
janvier).
Ce qui compte est de regarder les plantes, de les comprendre et de
leur donner un maximum de chances.
vendredi 29 novembre 2013
Amazing Rollers
AG: Deseada, you have been studying birds in the
south of Spain over the last 19 years. What made you so passionate about these
animals?
DPM: I don't
know exactly, but it is true that although I love animals in general, birds are
my favorite. Perhaps because their ability to fly away - and hence to escape - is challenging for us.
AG: One of
the birds you studied is the European Roller, one of the most colourful birds
we have in the Iberic peninsula. What are the traits of its biology that you
find surprising?
DPM: There
are many Roller traits that I find really astonishing. They migrate every year
to all over Europe from South Africa and back. Their sexual displays are
amazing, with rolling flights through which they exhibit the full range of
their marvellous colours to one another. Males and females fully share
incubation and parental care until the end of the nestling stage. There is also
the surprising behaviour of nestlings that expel out an orange liquid (some
kind of vomit) when they are disturbed at nests. Probably a defensive
behaviour against nest predators.
AG: You also studied the effect of installing
nest-boxes. What are the main results?
DPM: Roller
conservation plans have often relied on nest-box provisioning to improve
breeding populations. However, patterns of nest-box occupancy and breeding
success had never been explored for this species. We investigated in the south
of Spain the efficacy of nest-box provisioning by analysing nest-box selection
for breeding and reproductive performance. Our results indicate that nest-boxes
should not be installed in too easily detectable locations, where breeding
failure is more likely, or in highly concealed locations, which are probably
undetectable for prospecting Rollers. Finally, future conservation plans for
this species should aim to avoid placing nest-boxes near motorways and near
patches of almond groves or pine plantations. Instead, conservation plans
should promote combined plans of nest-box provisioning with the creation of a
mosaic of alternating herb crops and woody groves to enhance the probability of
colonization by Rollers.
AG: How do you see the future of the roller in
Extramadura and in the Alentejo? What is the current state of the populations?
DPM: I think
that in Extremadura and in the Alentejo, Rollers have healthy populations. The
main threat for the species in the area is agricultural intensification and the
habitat loss it leads to (removal of trees) as well as the use of pesticides.
AG: What are your own research projects in the
future? Are there still mysteries regarding the roller that you would like to
clear up?
DPM: I will
continue to deepen my knowledge of the biology of this amazing species. In
particular, I´m very interested in studying the species outside of the
Peninsula during its migratory journey. Many birds never return from Africa. It
could be interesting to investigate the threats that the species is under
during winter time. Also, I would like to learn more about the nature of the
defensive vomit that I mentioned above.
AG: What is the most special moment you
remember during your observations of rollers in the field?
DPM: Capturing some breeding adults is always a unique moment as rollers are very intelligent
birds. They usually detect all sorts of artefacts that we use to catch them.
So, when you succeed to capture one of them it is really great. And they also defend themselves very aggressively when they are handled…
lundi 4 novembre 2013
Madrugada cor de rosa e de laranja
Et comme toujours, les lumières sont incroyables. Ici, l'aube rose-orange sur le Monte il y a quelques jours...
O ramo de murta do José
José, muni d'un sécateur et accompagné de son chien "pouco confiança", profite lui aussi des belles journées de Toussaint pour aller se chercher un petit bouquet de Myrte sauvage (Myrthus communis) à la rivière, de quoi assaisonner de délicieuses olives. Il n'est semble-t-il pas le seul à apprécier l'odeur du Myrte...
Narcisses d'automne (Narcissus serotinus)
Nous sommes à la toute fin d'octobre. La pluie est tombée en quantité la semaine dernière, et nous voilà entrés dans le second été de l'Alentejo, celui des coings et de la Saint Martin. Une semaine de soleil, puis deux,... Les pâturages du Monte en ont profité pour se fleurir à nouveau. Ce ne sont certes pas les jaunes et les bleus flamboyants du printemps. C'est le blanc des petits narcisses d'automne (Narcissus serotinus) qui mouchette les herbes sèches, en compagnie des clochettes de nivéoles d'automne (Acis autumnale) et de quelques touches très discrètes de scilles d'automne (Scilla autumnalis). Le parfum des narcisses est exquis...
Et voici un colchique (?), automnal lui aussi, photographié en octobre 2005 dans la région de Reguengos
samedi 19 octobre 2013
Phlomis lychnitis tea
Last sunday, I was buying some greek mountain tea at the Boitsfort market. This "tea" is made of Sideritis sp. and harvested in the Holomonta Mountain in Greece. I then remembered to have seen bunches of dried yellow flowers sold as tea at the Estremoz saturday Market (below, in august 2011). I asked my botanists friends from Portugal and they told me that these bunches were from another species: Phlomis lychnitis.
In fact, we have some large Phlomis russeliana growing in our garden in Boitsfort and the more delicate Phlomis lychnitis grows wild at … Monte das cebolas, close to the river (above, at the end of May 2010). After a quick search, I discovered two interesting uses of P. lychnitis.
First, its leaves, impregnated with oil, were used in the past as wicks for lamps. This is reflected in the plant's popular names: "herbe aux mèches" (in French), "candilera" and "torcida" (in Spanish),… The scientific name may refer to this, although the exact etymology of phlomis and lychnitis is far from straightforward as my colleague Paul-Augustin Deproost suggested me. Some claim that Phlomis comes from Phlox, which refers to flame in Greek and was then used later in latin - but also originally in Greek too as we shall see - for a botanical use, including by Plinus Secundus in his Naturalis Historia. There, he wrote at 21, 64: Florum prima ver nuntiat viola alba, tepidioribus vero locis etiam hieme emicat; post ea, quae ion appellatur et purpurea, proxime flammeum, quod phlox vocatur, silvestre dumtaxat (Transl. by PA Deproost in French as: "La violette blanche est la première des fleurs qui annoncent le printemps; mais dans les endroits plus chauds, elle s'épanouit même l'hiver; viennent ensuite la violette appelée ion, la violette pourprée, et très bientôt la plante couleur de flamme, que l'on appelle phlox, du moins l'espèce sauvage"). "Flame" may thus simply have to do with the firy yellow colour of the flower. Plinus also added at 21, 59 that colore tantum placet Iovis flos, odor abest, sicut et illi, qui graece phlox vocatur (Transl. by PA Deproost in French as: "La fleur de Jupiter ne plaît que par sa couleur, elle est inodore, de même que celle que l'on appelle en grec phlox"). This confirms that Phlox had a greek botanical use too. Moreover, it is unclear whether the word was meant to refer to "flame" or to "flame colour" as it may also simply derive from the old greek use of phlomis that had a directly botanical meaning too. As to "lychnitis", it may come from lychnus, a latinisation of lychnos referring to a lamp. However, lychnis was the greek name of a plant as well. So, while some hypothesize that the etymology of both "phlomis" and "lychnitis" could be traced back to the same meaning, i.e. flame, leading to something like "flame flame", one should not forget that the greeks also used directly "phlox", "phlomis" and "lychnis" as plant names.
First, its leaves, impregnated with oil, were used in the past as wicks for lamps. This is reflected in the plant's popular names: "herbe aux mèches" (in French), "candilera" and "torcida" (in Spanish),… The scientific name may refer to this, although the exact etymology of phlomis and lychnitis is far from straightforward as my colleague Paul-Augustin Deproost suggested me. Some claim that Phlomis comes from Phlox, which refers to flame in Greek and was then used later in latin - but also originally in Greek too as we shall see - for a botanical use, including by Plinus Secundus in his Naturalis Historia. There, he wrote at 21, 64: Florum prima ver nuntiat viola alba, tepidioribus vero locis etiam hieme emicat; post ea, quae ion appellatur et purpurea, proxime flammeum, quod phlox vocatur, silvestre dumtaxat (Transl. by PA Deproost in French as: "La violette blanche est la première des fleurs qui annoncent le printemps; mais dans les endroits plus chauds, elle s'épanouit même l'hiver; viennent ensuite la violette appelée ion, la violette pourprée, et très bientôt la plante couleur de flamme, que l'on appelle phlox, du moins l'espèce sauvage"). "Flame" may thus simply have to do with the firy yellow colour of the flower. Plinus also added at 21, 59 that colore tantum placet Iovis flos, odor abest, sicut et illi, qui graece phlox vocatur (Transl. by PA Deproost in French as: "La fleur de Jupiter ne plaît que par sa couleur, elle est inodore, de même que celle que l'on appelle en grec phlox"). This confirms that Phlox had a greek botanical use too. Moreover, it is unclear whether the word was meant to refer to "flame" or to "flame colour" as it may also simply derive from the old greek use of phlomis that had a directly botanical meaning too. As to "lychnitis", it may come from lychnus, a latinisation of lychnos referring to a lamp. However, lychnis was the greek name of a plant as well. So, while some hypothesize that the etymology of both "phlomis" and "lychnitis" could be traced back to the same meaning, i.e. flame, leading to something like "flame flame", one should not forget that the greeks also used directly "phlox", "phlomis" and "lychnis" as plant names.
What about the other interesting use of P. lychnitis? Although G. Benitez reports that P. purpurea seems to be more commonly used, especially by Andalusian shepherds, P. Lychnitis is traditionally know to be good for the stomach as an infusion (as well as for other affections, such as haemorrhoids). Popular names reflect a generalist use here: "té de monte" or "té de pastor" (in Spanish). Pardo de Santayana and his colleagues, in a 2005 study of various plants traditionnally referred to as "tea" in Spain report extensive use of it in the south west of Castilla-la-Mancha (Campo de Calatrava). Now we know that there are pockets of users in the south of Portugal too!
Campinho
Campinho is one of these adorable white and compact villages in the middle of the planice. Located in a corner of the landscape, cars don't pass here to go somewhere else. This makes the evenings on the main square quite intimate. And I'm always amazed by the fact of finding a restaurant, several cafés, a bakery, a carpenter, several shops,... in such a village of less than a thousand inhabitants. Every summer, you'll be able to enjoy the freshly repainted façades, each of them with a personal touch.
Céramiques en terre et blanc de Sao Pedro de Corval
Sao Pedro de Corval est connue dans l'Alentejo et au-delà pour ses céramistes. Et il y a un modèle de céramiques que vous trouverez chez Mufla (à Sao Pedro mais aussi à l'entrée de Monsaraz) qui est particulièrement original, joignant la terre et le blanc. C'est Isabel Mestre qui initia ce travail tout en finesse et Anabela Lourenço qui reprit ensuite le flambeau. Les vases sont très réussis...
mercredi 2 octobre 2013
Orchidées du Portugal et... (Entrevue avec Daniel Tyteca)
A.G. : Daniel, tu es un des
grands spécialistes des orchidées en Europe et tu t'es particulièrement
penché - c'est le cas de le dire! - sur celles du Portugal. Qu'est-ce qui t'a conduit à t'intéresser particulièrement à ce pays?
D. T. : Passionné
d'orchidées depuis plus de 40 ans, j'ai toujours été tourné vers le sud. Et
parmi les orchidologues, peu s'intéressaient au Portugal. J'ai eu l'occasion
d'y aller deux ou trois fois. J'ai alors décidé d'y passer plus de temps.
Depuis 1983, j'y ai effectué une trentaine de séjours. Les régions qui
comportent la plus grande diversité d'orchidées sont l'Algarve (en particulier
le Barrocal et tout spécialement la colline de Morgado, entre Loulé et São Bras
de Alportel), l'Extremadura
(notamment la Serra da Arrábida
et en particulier la Serra de Palmela) et le Ribatejo, en raison de leur sol calcaire.
A.G. : En termes d'espèces,
qu'est-ce qui est particulièrement intéressant au Portugal?
D.T. : C’est un pays qui
compte aujourd'hui 63 espèces d'orchidées (sans mentionner Epipactis palustris qui y a disparu), ce qui n'est pas beaucoup par
rapport à des pays comme la Grèce ou l'Italie qui abritent respectivement 206 et 193 espèces. Cela s'explique, d'une part, par la plus grande diversité de conditions écologiques dans
ces deux autres pays, qui comportent de nombreuses îles et des altitudes
élevées, et d'autre part, par la position extrême du Portugal, aux confins du
continent européen.
Les Ophrys en particulier sont représentés au Portugal par 18 espèces,
en ce compris O. algarvensis et O. quarteirae concentrés sur le sud de la péninsule ibérique, O. lusitanica
qui existe principalement au Portugal, y compris jusqu'en Beira Litoral, avec
quelques incursions en Espagne, et surtout O.
pintoi et O. lenae
- toutes deux décrites en 2012 par Michael
Lowe et moi-même - et qui n'existent qu'au Portugal, aux confins de l'Extremadura, de la Beira Litoral et du
Ribatejo, notamment - et respectivement - à Rabaçal et dans la Serra dos Candeeiros. Voici par exemple la très belle Ophrys incubacea, observée à la fin mars 2008.
A.G. : Et à part les Ophrys?
D.T. : Il y a évidemment les Dactylorhiza et les Epipactis. Je pense par exemple à une nouvelle espèce que j'ai décrite en 1988, E. lusitanica et qui est présente un peu partout au Portugal et dans le sud-ouest de l'Espagne. Dactylorhiza caramulensis est aussi intéressante et a été décrite par Vermeulen, un orchidologue hollandais, en 1970.
D.T. : Il y a évidemment les Dactylorhiza et les Epipactis. Je pense par exemple à une nouvelle espèce que j'ai décrite en 1988, E. lusitanica et qui est présente un peu partout au Portugal et dans le sud-ouest de l'Espagne. Dactylorhiza caramulensis est aussi intéressante et a été décrite par Vermeulen, un orchidologue hollandais, en 1970.
... orchidées de l'Alentejo (suite)
A.G. : Venons-en
peut-être à l'Alentejo…
D.T. : Il y a une
espèce qui n'est présente au Portugal qu'en Alentejo, dans la Serra de Ficalho
en particulier: l’Anacamptis collina (ci-dessous, fin février 2011) qui apprécie des terrasses d'oliviers, des prairies pâturées. J'en ai le
souvenir d'autant plus vif que… je me suis cassé la jambe en la cherchant !
Subsistent aussi certaines prairies humides particulièrement intéressantes où
l'on trouve l’Anacamptis laxiflora -
une espèce à large répartition - que je n'y ai trouvé pour la première fois
qu'en 2001, après de nombreuses années de prospection (ci-dessous à Amieira en compagnie de Scilla peruviana à la mi-avril 2009). C'est dire s'il y
est localisé. Et je l'ai cherché ailleurs au Portugal dans des endroits
où il avait été signalé anciennement, sans succès.
A.G. : Quel est ton coin favori dans l'Alentejo pour
l'observation des orchidées?
D.T. : Il y a les
prairies humides de la région de Portel et Beja, par exemple à Alvito avec leur cortège de Serapias, et notamment une espèce verte,
le Serapias perez-chiscanoi (ci-dessous à la mi-avril 2009) dédié au botaniste espagnol Perez Chiscano.
La région de Reguengos
a été plus dégradée. Au sud de Monsaraz
se trouvaient de belles prairies remplies d'orchidées, parmi lesquelles la
somptueuse Anacamptis papilionacea,
accompagnée de son hybride avec Anacamptis
champagneuxii. Au cours des deux dernières décennies, en raison de
l'intensification de l'agriculture et de l'apport d'engrais, ces biotopes
admirables ont pratiquement disparu.
Quant à la région de Castelo
de Vide, on peut y parcourir des chataigneraies magnifiques à Dactylorhiza markusii et Androrchis langei. Je mentionnerais également
les lits de rivière avec filets d'eau,
où prospèrent des colonies parfois considérables d'une orchidée particulièrement rare en Europe, Spirantes aestivalis, notamment dans le sud de l'Alentejo, par exemple à Senhora de Graça de Padrões, village situé non
loin d'Almodôvar. Et je
terminerais par le cortège d'espèces liées au Chêne-Liège (Sobral), parmi lesquelles on retrouve Anacamptis morio, Serapias cordigera,
Epipactis lusitanica, Limodorum abortivum, Neotinea maculata ...
Il y a d’ailleurs dans cette
région un spécialiste local, Ivo Rodrigues, orchidologue de terrain qui connait
extrêmement bien les stations locales et qui y consacre un blog (Orquídeas alem - Tejo) que je vous encourage à aller visiter.
A.G. : As-tu le souvenir
d'un grand moment de découverte?
D.T. : Les Spirantes
aestivalis, dans la Ribeira
de Odeleite et ses affluents
alentejanos, en fin mai, quand les ruisseaux commencent à s'assécher. On en
trouve des milliers. Ils sont presque présents partout dans ces endroits alors
que c'est une rareté en Europe.
A.G. : Une toute dernière chose, Daniel :
peux-tu nous en dire un peu plus sur un des grands spécialistes portugais des
orchidées, José d'Ascenção Guimarães?
D.T. : Guimarães (1862 - 1922) fut l’un des premiers botanistes à accomplir un travail complet sur les Orchidées dans la Péninsule ibérique. C'est ainsi qu'il publia en 1887 un travail imposant et pionnier en la matière, Orchideographia portuguesa (Bol. Soc. Brot. 5: 17-82). On y dénombrait déjà pas moins de 50 espèces d'orchidées, dont certaines ont été réinterprétées différemment par la suite. Il faut dire que les botanistes de l'époque n'avaient pas à leur disposition les méthodes d'analyse et moyens de déplacement dont nous disposons aujourd'hui … J'ai eu l'honneur de lui dédier en 2000 une sous-espèce d'orchidée: Ophrys tenthredinifera subsp. guimaraesii.
D.T. : Guimarães (1862 - 1922) fut l’un des premiers botanistes à accomplir un travail complet sur les Orchidées dans la Péninsule ibérique. C'est ainsi qu'il publia en 1887 un travail imposant et pionnier en la matière, Orchideographia portuguesa (Bol. Soc. Brot. 5: 17-82). On y dénombrait déjà pas moins de 50 espèces d'orchidées, dont certaines ont été réinterprétées différemment par la suite. Il faut dire que les botanistes de l'époque n'avaient pas à leur disposition les méthodes d'analyse et moyens de déplacement dont nous disposons aujourd'hui … J'ai eu l'honneur de lui dédier en 2000 une sous-espèce d'orchidée: Ophrys tenthredinifera subsp. guimaraesii.
Les photos illustrant cette entrevue sont de Daniel Tyteca. Pour en savoir plus sur ses recherches, jetez un oeil ici.
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