samedi 19 octobre 2013

Phlomis lychnitis tea

Last sunday, I was buying some greek mountain tea at the Boitsfort market. This "tea" is made of Sideritis sp. and harvested in the Holomonta Mountain in Greece. I then remembered to have seen bunches of dried yellow flowers sold as tea at the Estremoz saturday Market (below, in august 2011). I asked my botanists friends from Portugal and they told me that these bunches were from another species: Phlomis lychnitis.


In fact, we have some large Phlomis russeliana growing in our garden in Boitsfort and the more delicate Phlomis lychnitis grows wild at … Monte das cebolas, close to the river (above, at the end of May 2010). After a quick search, I discovered two interesting uses of P. lychnitis.

First, its leaves, impregnated with oil, were used in the past as wicks for lamps. This is reflected in the plant's popular names: "herbe aux mèches" (in French), "candilera" and "torcida" (in Spanish),… The scientific name may refer to this, although the exact etymology of phlomis and lychnitis is far from straightforward as my colleague Paul-Augustin Deproost suggested me. Some claim that Phlomis comes from Phlox, which refers to flame in Greek and was then used later in latin - but also originally in Greek too as we shall see - for a botanical use, including by Plinus Secundus in his Naturalis Historia. There, he wrote at 21, 64: Florum prima ver nuntiat viola alba, tepidioribus vero locis etiam hieme emicat; post ea, quae ion appellatur et purpurea, proxime flammeum, quod phlox vocatur, silvestre dumtaxat (Transl. by PA Deproost in French as: "La violette blanche est la première des fleurs qui annoncent le printemps; mais dans les endroits plus chauds, elle s'épanouit même l'hiver; viennent ensuite la violette appelée ion, la violette pourprée, et très bientôt la plante couleur de flamme, que l'on appelle phlox, du moins l'espèce sauvage"). "Flame" may thus simply have to do with the firy yellow colour of the flower. Plinus also added at 21, 59 that colore tantum placet Iovis flos, odor abest, sicut et illi, qui graece phlox vocatur (Transl. by PA Deproost in French as: "La fleur de Jupiter ne plaît que par sa couleur, elle est inodore, de même que celle que l'on appelle en grec phlox"). This confirms that Phlox had a greek botanical use too. Moreover, it is unclear whether the word was meant to refer to "flame" or to "flame colour" as it may also simply derive from the old greek use of phlomis that had a directly botanical meaning too. As to "lychnitis", it may come from lychnus, a latinisation of lychnos referring to a lamp. However, lychnis was the greek name of a plant as well. So, while some hypothesize that the etymology of both "phlomis" and "lychnitis" could be traced back to the same meaning, i.e. flame, leading to something like "flame flame", one should not forget that the greeks also used directly "phlox", "phlomis" and "lychnis" as plant names.


What about the other interesting use of P. lychnitis? Although G. Benitez reports that P. purpurea seems to be more commonly used, especially by Andalusian shepherds, P. Lychnitis is traditionally know to be good for the stomach as an infusion (as well as for other affections, such as haemorrhoids). Popular names reflect a generalist use here: "té de monte" or "té de pastor" (in Spanish). Pardo de Santayana and his colleagues, in a 2005 study of various plants traditionnally referred to as "tea" in Spain report extensive use of it in the south west of Castilla-la-Mancha (Campo de Calatrava). Now we know that there are pockets of users in the south of Portugal too!



Bench in the fields... (Redondo, August 2013)


Campinho

Campinho is one of these adorable white and compact villages in the middle of the planice. Located in a corner of the landscape, cars don't pass here to go somewhere else. This makes the evenings on the main square quite intimate. And I'm always amazed by the fact of finding a restaurant, several cafés, a bakery, a carpenter, several shops,... in such a village of less than a thousand inhabitants. Every summer, you'll be able to enjoy the freshly repainted façades, each of them with a personal touch.






Céramiques en terre et blanc de Sao Pedro de Corval

Sao Pedro de Corval est connue dans l'Alentejo et au-delà pour ses céramistes. Et il y a un modèle de céramiques que vous trouverez chez Mufla (à Sao Pedro mais aussi à l'entrée de Monsaraz) qui est particulièrement original, joignant la terre et le blanc. C'est Isabel Mestre qui initia ce travail tout en finesse et Anabela Lourenço qui reprit ensuite le flambeau. Les vases sont très réussis...






mercredi 2 octobre 2013

Orchidées du Portugal et... (Entrevue avec Daniel Tyteca)


A.G. : Daniel, tu es un des grands spécialistes des orchidées en Europe et tu t'es particulièrement penché - c'est le cas de le dire! - sur celles du Portugal. Qu'est-ce qui t'a conduit à t'intéresser particulièrement à ce pays?

D. T. : Passionné d'orchidées depuis plus de 40 ans, j'ai toujours été tourné vers le sud. Et parmi les orchidologues, peu s'intéressaient au Portugal. J'ai eu l'occasion d'y aller deux ou trois fois. J'ai alors décidé d'y passer plus de temps. Depuis 1983, j'y ai effectué une trentaine de séjours. Les régions qui comportent la plus grande diversité d'orchidées sont l'Algarve (en particulier le Barrocal et tout spécialement la colline de Morgado, entre Loulé et São Bras de Alportel), l'Extremadura (notamment la Serra da Arrábida et en particulier la Serra de Palmela) et le Ribatejo, en raison de leur sol calcaire.

A.G. : En termes d'espèces, qu'est-ce qui est particulièrement intéressant au Portugal?

D.T. : C’est un pays qui compte aujourd'hui 63 espèces d'orchidées (sans mentionner Epipactis palustris qui y a disparu), ce qui n'est pas beaucoup par rapport à des pays comme la Grèce ou l'Italie qui abritent respectivement 206 et 193 espèces. Cela s'explique, d'une part, par la plus grande diversité de conditions écologiques dans ces deux autres pays, qui comportent de nombreuses îles et des altitudes élevées, et d'autre part, par la position extrême du Portugal, aux confins du continent européen.

Les Ophrys en particulier sont représentés au Portugal par 18 espèces, en ce compris O. algarvensis et O. quarteirae concentrés sur le sud de la péninsule ibérique, O. lusitanica qui existe principalement au Portugal, y compris jusqu'en Beira Litoral, avec quelques incursions en Espagne, et surtout O. pintoi et O. lenae - toutes deux décrites en 2012 par Michael Lowe et moi-même - et qui n'existent qu'au Portugal, aux confins de l'Extremadura, de la Beira Litoral et du Ribatejo, notamment - et respectivement - à Rabaçal et dans la Serra dos Candeeiros. Voici par exemple la très belle Ophrys incubacea, observée à la fin mars 2008.



A.G. : Et à part les Ophrys?

D.T. : Il y a évidemment les Dactylorhiza et les Epipactis. Je pense par exemple à une nouvelle espèce que j'ai décrite en 1988, E. lusitanica et qui est présente un peu partout au Portugal et dans le sud-ouest de l'Espagne. Dactylorhiza caramulensis est aussi intéressante et a été décrite par Vermeulen, un orchidologue hollandais, en 1970.

... orchidées de l'Alentejo (suite)

A.G. : Venons-en peut-être à l'Alentejo…

D.T. : Il y a une espèce qui n'est présente au Portugal qu'en Alentejo, dans la Serra de Ficalho en particulier: l’Anacamptis collina (ci-dessous, fin février 2011) qui apprécie des terrasses d'oliviers, des prairies pâturées. J'en ai le souvenir d'autant plus vif que… je me suis cassé la jambe en la cherchant !


Subsistent aussi certaines prairies humides particulièrement intéressantes où l'on trouve l’Anacamptis laxiflora - une espèce à large répartition - que je n'y ai trouvé pour la première fois qu'en 2001, après de nombreuses années de prospection (ci-dessous à Amieira en compagnie de Scilla peruviana à la mi-avril 2009). C'est dire s'il y  est localisé. Et je l'ai cherché ailleurs au Portugal dans des endroits où il avait été signalé anciennement, sans succès.


A.G. :  Quel est ton coin favori dans l'Alentejo pour l'observation des orchidées?

D.T. : Il y a les prairies humides de la région de Portel et Beja, par exemple à Alvito avec leur cortège de Serapias, et notamment une espèce verte, le Serapias perez-chiscanoi (ci-dessous à la mi-avril 2009) dédié au botaniste espagnol Perez Chiscano.



La région de Reguengos a été plus dégradée. Au sud de Monsaraz se trouvaient de belles prairies remplies d'orchidées, parmi lesquelles la somptueuse Anacamptis papilionacea, accompagnée de son hybride avec Anacamptis champagneuxii. Au cours des deux dernières décennies, en raison de l'intensification de l'agriculture et de l'apport d'engrais, ces biotopes admirables ont pratiquement disparu.

Quant à la région de Castelo de Vide, on peut y parcourir des chataigneraies magnifiques à Dactylorhiza markusii et Androrchis langei. Je mentionnerais également les lits de rivière avec filets d'eau, où prospèrent des colonies parfois considérables d'une orchidée particulièrement rare en Europe, Spirantes aestivalis, notamment dans le sud de l'Alentejo, par exemple à Senhora de Graça de Padrões, village situé non loin d'Almodôvar. Et je terminerais par le cortège d'espèces liées au Chêne-Liège (Sobral), parmi lesquelles on retrouve Anacamptis morio, Serapias cordigera, Epipactis lusitanica, Limodorum abortivum, Neotinea maculata ...

Il y a d’ailleurs dans cette région un spécialiste local, Ivo Rodrigues, orchidologue de terrain qui connait extrêmement bien les stations locales et qui y consacre un blog (Orquídeas alem - Tejo) que je vous encourage à aller visiter.

A.G. : As-tu le souvenir d'un grand moment de découverte?

D.T. : Les Spirantes aestivalis, dans la Ribeira de Odeleite et ses affluents alentejanos, en fin mai, quand les ruisseaux commencent à s'assécher. On en trouve des milliers. Ils sont presque présents partout dans ces endroits alors que c'est une rareté en Europe.

A.G. : Une toute dernière chose, Daniel : peux-tu nous en dire un peu plus sur un des grands spécialistes portugais des orchidées, José d'Ascenção Guimarães?

D.T. : Guimarães (1862 - 1922) fut l’un des premiers botanistes à accomplir un travail complet sur les Orchidées dans la Péninsule ibérique. C'est ainsi qu'il publia en 1887 un travail imposant et pionnier en la matière, Orchideographia portuguesa (Bol. Soc. Brot. 5: 17-82). On y dénombrait déjà pas moins de 50 espèces d'orchidées, dont certaines ont été réinterprétées différemment par la suite. Il faut dire que les botanistes de l'époque n'avaient pas à leur disposition les méthodes d'analyse et moyens de déplacement dont nous disposons aujourd'hui … J'ai eu l'honneur de lui dédier en 2000 une sous-espèce d'orchidée: Ophrys tenthredinifera subsp. guimaraesii

Les photos illustrant cette entrevue sont de Daniel Tyteca. Pour en savoir plus sur ses recherches, jetez un oeil ici.