dimanche 4 octobre 2020

Violeta, Jeropiga: une page se tourne

Ce fut un des moments d'émotion de l'été au Monte. Depuis de nombreux mois, la frustration grandissait de ne pas pouvoir passer plus de temps avec nos deux ânesses. Elles étaient un peu les âmes du Monte. J'avais toujours rêvé de leur présence. Ce rêve s'était réalisé. Elles étaient là, toujours promptes à partager leur affection et leur douceur - comme ici le jour de leur départ dans un moment immortalisé par Alex. Mais je sentais qu'il fallait leur trouver un autre lieu où elles auraient plus d'interactions, une vie sociale et affective plus riche, avec d'autres ânes, et sans qu'elles soient séparées l'une de l'autre. Puis j'ai croisé Manuel à Amieira, un soir après la baignade au lac. Une homme de Marmelar était semble-t-il à la recherche d'animaux pour agrandir son petit troupeau. L'opportunité était là. Quelques jours après, Violeta et Jeropiga embarquaient pour ce nouveau voyage, vers d'autres paysages.

Il va falloir apprendre à vivre sans leur présence magique, un peu comme quand vient le moment pour un être proche de prendre son indépendance. Le peuple des churras, des abeilles, des chouettes et des busards nous y aidera un peu. Et puis, on ira leur rendre visite, sur les collines de Marmelar. On les imagine déjà parcourant les prés avec les autres membres du quintet, voire suitées par de petits ânons. Le Monte restera à jamais leur demeure. Et qui sait, un jour quand la disponibilité sera plus grande, il sera peut-être encore temps de les faire revenir...

L' heure des busards


En aout, vers 6h30, c'est l'heure des lumières magiques. C'est le moment de la cueillette express des figues, avant que les pies bleues déboulent. Et c'est aussi l'heure à laquelle les busards au dortoir surgissent des hautes herbes et prennent leur envol à quelques minutes d'intervalle les uns des autres. C'est l'heure intense, qui donne le coup d'envoi de matins actifs.



Chaulage d'été

dimanche 20 septembre 2020

Mulching experiments: cardboard and whool

Mulching fulfils a variety of functions: it reduces evaporation, slows down the germination of weeds, offers additional organic material,... We usually mulch with straw at the Monte as it is a material that is easy to handle. We generally spread the content of one small straw bale around each fruit tree. This year, we experimented with two less usual mulching materials. One is cardboard, which we used specifically to try and slow down the growth of couch grass (Cynodon dactylon) ("grama-bermudas" in Portuguese). The latter tends to be one of our greatest challenges. The other mulching material is whool. The COVID-19 crisis seems to have killed the whool market in our area and we had then a large amount of whool at our disposal, which we decided to take advantage of. Let's see in a few months how both mulching materials will behave. With the rainy season coming, cardboard is likely to decompose. However, it may have managed in the meantime to reduce couch grass's vigor.

Les hirondelles de Paula Lança


L'hirondelle de céramique trainait dans l'obscurité d'une armoire depuis quelques mois. Ce dimanche d'août, c'était je jour des petites réparations au Monte. On s'est donc décidés avec Joaquim Inacio à faire voler la belle hirondelle de Paula Lança sur le mur du Monte. Et en lui creusant une accroche dans le pisé, on s'est dit que ce serait une bonne idée de lui creuser une compagne de l'autre côté de la porte, ce que JI réalisa avec talent, et un style qui rappellerait presque Vhils. Nous aurons donc deux hirondelles à l'année, l'une en relief et l'autre en creux, même quand leurs congénères se trouveront de l'autre côté du détroit de Gibraltar.

samedi 19 septembre 2020

Les "Cerqueiros" de Manuel (Quercus rotundifolia x Q. suber)

Cet hiver, j'avais posé la question à mon ami Manuel: "Ce chêne est particulièrement majestueux. N'est-il pas différent des autres?". Et il m'avait répondu: "bien sûr, c'est un "bugalheiro" et j'en connais quelques autres". Intrigué, je partis en parler autour de moi au village. De fil en aiguille, je découvris que quelques personnes à Campinho désignaient sous le vocable de "sequeiro" des chênes différents de nos chênes verts habituels (Q. rotundifolia). S'en suivirent des conversations avec Carlos Vila-Viçosa et il s'avéra qu'il s'agissait sans doute d'un Cerqueiro, l'hybride entre le chêne vert (Q. rotundifolia) et le chêne liège (Q. suber). Je promis à Carlos qu'à mon retour, j'irais jeter un coup d'oeil un peu plus proche à ce fameux "Sequeiro". Entretemps, la crise du COVID est passée par là et l'ami Manuel nous a quitté tragiquement... Ce qui allait redoubler ma curiosité pour cet hybride, une manière de lui rendre hommage et de tenter de mieux comprendre ce qu'il savait.

A mon retour cet été, il était temps d'en savoir un peu plus. Je commençai par le Cerqueiro devant lequel j'étais passé pendant ... 15 ans sans jamais me rendre compte que c'était un hybride. Et effectivement, une couleur du feuillage plus claire que celle des chênes verts environnants, une écorce avec des allures de chêne liège un peu plus prononcé, et la nervation du dessous des feuilles ainsi que leur forme ne trompaient pas. Des signes distinctifs que j'allais désormais garder en tête lors de mes ballades à vélo. 

Ma curiosité attisée, je me pris au jeu d'en chercher d'autres. Petit tour avec Joaquim pour en découvrir deux magnifiques, à quelques dizaines de mètres du Monte das Cebolas, et que je n'avais jamais été voir. Puis trois autres grâce aux indications de Ze Francisco. Un autre encore en compagnie de Helder. Bref: Monte da Duquesa, Monte Santo Amador, Monte da Figueira, Monte das Burras, Monte da Canada novo... chacun avait un ou deux hybrides à nous proposer. Et finalement, ce ne sont pas moins d'une douzaine de "Cerqueiros" sur lesquels nous sommes tombés, des F1 et F2, avec quelques uns particulièrement majestueux.




Et puis, les questions fusent. Des questions de biologie d'abord, qu'elles aient trait à la phénologie de leur pollinisation croisée, aux facteurs qui favoriseraient cette hybridation, à la taille énorme des glands - résulte-t-elle d'une plus grande difficulté à être pollinisé, réduisant ainsi le nombre de glands? -, ... 

Et puis, il y a aussi toute la dimension ethno-botanique de l'arbre que les locaux semblent bien connaitre. Au moins deux des exemplaires rencontrés présentaient des traces récentes d'extraction de l'écorce en vue d'usage "médicaux". En discutant avec mes amis alentejanos, il s'avère qu'une fois l'écorce plongée dans l'eau, le liquide qui en résulte est utilisé pour pratiquer des avortements, en le buvant. Quel serait ce composant présent dans le chêne hybride, qui ne le serait pas dans les chênes vert ou liège? Beaucoup ont connaissance de cet usage abortif. Mais ce liquide servirait aussi à traiter des maladies de la peau, y compris chez les animaux.


Manuel m'avait mis sur une piste... Et j'ai à présent pas mal de nouvelles questions à dénouer, ainsi que quelques idées sur la manière de lui rendre hommage... Merci l'ami! Tu nous manques beaucoup trop...

The praying mantises of Campinho

There are around ten species of praying mantises ("Louva-a-deus" in Portuguese) in Portugal. So far, I hadn't paid too much attention to them, taking a picture from time to time. This summer, I decided to look more carefully. As a result, we ended up coming across four different species of mantises. By far the most common is the European mantis Mantis religiosa (here, a male in a pomegranate bush the leaves of which are cut by Megachile bees). Walking through the grassland, I came across many of them this summer.

I was also happy to find two nymphs of conehead mantis Empusa pennata ("diabinho" in Portuguese) at two separate spots of the Monte. They were no larger than my thumbnail at this lifestage. 

The biology of Conehead mantises differs from the one of other Mantises since it seems that females don't tend to eat the males after mating. The antennae of adult males are impressive and much longer than those of females. Here is one of the nymphs (above). If you are curious about their biology (and if you happen to read French), here is what the great entomologist Jean-Henry Fabre was writing about them at the very end of the 19th century.

We had already come across Mantis religiosa several times before. The same holds for Empusa pennata once, a few years ago. The surprise came from two extra species. One is the Mediterranean Mantis Iris oratoria, ("Louva-a-deus-ocelado" in Portuguese), with its wings painted with colorful eyespots... We came across a few in the village garden. Here is one on a Chaste tree bush.


The last species is the European dwarf mantis Ameles spallanzania. The female (pictured here) has very short wings and is unable to fly, with conic eyers and a short and curved abdomen. This one came as a real surprise. The challenge will be to meet it again, and perhaps to discover one or two more species of Mantises, among those present in the Alentejo. We'll keep our eyes wide open...

Manneken pis in the Serra d'Ossa (Rio de Moinhos)

One of the great legacies of the Brussels culture is its "Manneken pis" (also known as "Julianske"). There is admittedly growing evidence of the importance of human urine as a fertilizer in agriculture (see also this great book in French). However, Brusseleers have also known for a long time the importance of peeing to extinguish early fires and/or to win battles. My alentejano fellows are wise people (well... most of the time) and they are keen on reminding us about this Belgian wisdom. You will find evidence of this in Castelo de Vide. But we also came across further evidence this summer in Rio de Moinhos, in the heart of Serra d'Ossa, admittedly in a less active version. Here is the proof (especially for my friend Wouter), as mathematicians would say.


Manneken pis is of course not the only sign of openness of Alentejanos to foreign cultures. Another example of cultural hybridization (or "zinnekification" as Brussels people would say) from Rio de Moinhos is this authentic London double-decker with its vertical garden at the back...

 

... and possibly as well this swimmer in the air


In short, Rio de Moinhos is worth a visit and if you consider it, have a look at this TransAlentejo trail. Enjoy...

dimanche 26 janvier 2020

Elsa, Fabian and the ponds


Just before Christmas 2019, Storms Elsa and Fabian brought us more than 70 mm of water in a few days, which means millions of liters on the farm. A blessing after such a dry year. The frogs and toads were singing at dusk. And all our 14 Mediterranean temporary ponds but one were quickly filled to the brim. Some of them infiltrate better, rendering them especially useful for the surrounding trees's root system and the aquifer. Others hardly infiltrate because they are in a stone bed, which makes them very suitable for the reproduction of amphibians. With ponds scattered everywhere, the landscape feels very different from what we would expect from a dryland savannah. Impatient to discover the frogs and toads reproduction in spring. In the swales of the orchard, it is also super easy to plant bare roots trees and simply water them with the swale water.






The Christmas frog and the Cape gooseberries



It seems that Mediterranean tree frogs (Hyla meridionalis) especially enjoy the Cape gooseberries (Physalis peruviana) of the Horta and their little japanese lanterns. It has become a sort of annual meeting, until the heavy frosts of January fall on the plant. While we pick the berries, we keep an open eye in the hope of coming across this true jewel, definitely one of the prettiest of all amphibians. Very few other amphibians are to be seen at this season. Two crushed Pleurodeles Waltl on the village road and some Alytes cisternasii that T. spotted in january in two of our ponds and in the river.

Winter mist


We got very few misty days during the winter break. On one of those mornings, I took the bike early and stopped at a few trees pruned last winter on my way to the farm, enjoying this magic light. In front of the first large holm oak (Quercus rotundifolia), you can see some branch nests prepared to protect very young oak trees against sheep. Farmer Managed Natural Regeneration (FMNR) in progress... This winter, we pruned more than 70 young oak trees.



samedi 25 janvier 2020

Butineuses au coeur de l'hiver


Une des magies de l'hivernage dans l'Alentejo est de côtoyer au coeur de l'hiver nos petites butineuses sur diverses fleurs - celles du Frêne (Fraxinus angustifolia) aux floraisons éphémères, du Romarin (Salvia rosmarinus), du Néflier du Japon (Eriobotrya japonica), ou des Diplotaxis qui tapissent l'avant du Monte en cette saison.



Nos deux petites ruches sont pleines d'activité même si au petit matin le givre enrobe les herbes environnantes. On pointe parfois du doigt les Apis mellifera pour la concurrence qu'elles engendrent avec les abeilles solitaires. Mais en cette saison, elles semblent les seules butineuses à être présentes en nombre. Une des réponses est évidemment d'élever nos abeilles ibériques en nombre raisonnable. Et une autre est aussi de multiplier les habitats et sources de nourriture pour tous les hyménoptères.

Le pollen écarlate de l'Aloe


Au village, les Aloes sont en pleine floraison au tout début janvier. Au lever, il gèle dehors. Nous mettons le feu de bois en marche et après un bref petit déjeuner, commence une matinée de concentration devant l'écran. Dès que le soleil pointe son nez, fauvettes (ci-dessus un mâle de f. à tête noire) et pouillots viennent chipoter dans les inflorescences d'Aloe arborescens


Mais nous savons aussi qu'en fin de matinée, quand vient un peu plus de chaleur, une abeille aventurière viendra y chercher le pollen écarlate. Il n'y en a jamais plus qu'une, peut-être parce qu'il n'y a pas de ruche à proximité. Mais Y. et moi sommes tous deux à l'affût avec notre objectif macro dès que notre cerveau a fait le plein d'idées. On en vient à rêver d'une minuscule forêt d'Aloes - arborescens mais aussi rupestris, ferox, etc. bourdonnante d'abeilles à chaque fête de noël. Ci-dessous, deux images prises par Y...


Le mauve pastel de la Tomentelle


On pense parfois que l'hiver est une saison aux couleurs fades. Mais voici encore un exemple des belles couleurs de la période natale au Monte. En plantant des jeunes Arbousiers et Térébinthes, Alicia est tombée sur ce champignon mycorrhizien. Il pourrait s'agir d'après mes amis mycologues d'une Tomentelle répondant au doux nom de Tomentellopsis submollis. Elle apporterait aux racines des chênes verts l'azote présent dans des débris d'insectes ou de champignons. Merci à L. Bailly et J-M. Pirlot pour leurs lumières sur ce champignons sous-terrain.